Quand le bio alimente la croissance

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En décembre 1999, lors du colloque L’agriculture biologique face à son développement : les enjeux futurs, présenté dans le cadre des douzièmes entretiens du Cercle Jacques-Cartier, les délégués ont été amenés à se pencher sur l’expérience de la Meunerie Milanaise. Le propriétaire de l’entreprise, M. Robert Beauchemin, y évoqua alors les problèmes causés par la distribution de ses produits dans de grandes surfaces et précisa que les plus grands défis qui se poseraient à ce secteur en croissance seraient justement de ne pas dénaturer son caractère bio.

De toute évidence, M. Beauchemin et sa conjointe, Mme Lily Vallières, qui assurent tous deux la direction de la Meunerie Milanaise, peuvent se targuer d’avoir réussi haut la main.

Les céréales biologiques : un choix qui s’impose pour Robert Beauchemin

Pionnière du mouvement bio au Québec, l’entreprise transforme des céréales pour en faire principalement des farines, mais également des préparations à muffins et à crêpes; en outre, elle met en marché des grains et des légumineuses. Ses produits s’adressent au secteur de la boulangerie, aux consommateurs et aux entreprises de transformation alimentaire. Les farines sont certifiées biologiques par ÉCOCERT, ce qui garantit que tous les achats de matières premières et d’ingrédients de base qui entrent dans la fabrication des produits font l’objet d’un contrôle rigoureux par un organisme indépendant. De plus, tous les grains utilisés par la meunerie proviennent de fermes qui se consacrent à la culture biologique.

Depuis un peu plus d’un quart de siècle, la Meunerie Milanaise contribue à l’essor du monde biologique au Québec. C’est pour cette raison qu’en 2007, M. Beauchemin a reçu un prix d’excellence de l’Association canadienne des aliments de santé, en reconnaissance de sa contribution tout à fait exceptionnelle au développement du secteur biologique. En effet, ingénieur mécanique, titulaire d’une maîtrise en sciences mathématiques et d’un certificat en agrobiologie, Robert Beauchemin est toujours à l’affût des tendances qui se font jour dans son domaine et il se tient informé de tout ce qui survient sur le marché biologique. C’est ainsi qu’il a acquis, dans son parcours professionnel, une expertise des plus précieuses, pour ne pas dire unique au Québec et au Canada.

M. Beauchemin a défini en termes non équivoques la vision qui l’inspire chaque jour dans son travail : demeurer le chef de file dans la transformation du grain biologique. Une mission à laquelle les quelque 25 employés artisans de la meunerie adhèrent complètement. Dans ce contexte, l’homme d’affaires n’a jamais hésité à réinvestir son avoir pour mettre en valeur le potentiel de son entreprise. Nourris de la même passion, M. Beauchemin et Mme Vallières, cette dernière faisant bénéficier la meunerie de sa formation en nutrition, ont consacré beaucoup d’énergie et de ressources à la recherche-développement, et ce, tant pour améliorer leurs façons de faire que pour rehausser constamment la qualité de leurs produits.

Un couple de précurseurs

M. Beauchemin et Mme Vallières sont, à n’en point douter, de véritables précurseurs dans la culture biologique. Au cours des années 1970, ils quittent la ville. Leur décision est bien arrêtée; ils s’établissent alors à Milan, un petit village à quelques kilomètres de Lac-Mégantic, et

s’adonnent, dès 1977, à la culture de céréales biologiques. L’année 1982 est une année charnière : les agriculteurs troquent leurs salopettes pour un gilet de meunier et entreprennent la mouture des grains dans le petit moulin qu’ils ont construit. C’est le début de la Meunerie Milanaise, qui devient, dès 1985, la première entreprise de transformation spécialisée certifiée biologique au Québec. Mais cette meule de granit rose qui se met en branle trace aussi le chemin d’une aventure qui dure depuis près de 30 ans, pour laquelle l’intérêt et l’enthousiasme des entrepreneurs n’ont jamais cédé le pas à la lassitude. Si tout au long de ces années, Robert Beauchemin et Lily Vallières ont su préserver la flamme de l’entrepreneuriat, c’est, comme ils l’affirment, qu’ils sont « demeurés fidèles à eux-mêmes et aux valeurs d’artisans manufacturiers, dans lesquelles ils croient de façon inébranlable ».

La Meunerie Milanaise a du pain sur la planche!

La meunerie passe à deux, puis à quatre meules, pour répondre à la demande. L’année 1996 voit l’introduction d’une nouvelle gamme de pâtes alimentaires, ALEGRIA, fabriquées avec les farines de la minoterie. Un an plus tard, c’est le déménagement dans une nouvelle usine, offrant plus d’espace pour accueillir l’ensemble des activités de production. Enfin, en 2004, la mise en service d’un moulin à meules d’acier permet de commercialiser une farine blanche adaptée aux produits spécifiques de boulangerie.

Soutien et disponibilité : la SADC de la région de Mégantic en fait sa devise

Dynamiques, certes, mais également très confiants dans le potentiel du marché biologique, les promoteurs s’adressent, dès 1985, à la SADC de la région de Mégantic pour leur premier projet d’expansion. « La SADC de la région de Mégantic a été présente dès le départ pour soutenir notre entreprise et elle a cru en nous aux toutes premières heures, même si notre projet pouvait alors sembler farfelu. Encore aujourd’hui, elle est toujours prête à nous recevoir, et c’est grâce à ce genre de coup de pouce salutaire que l’entreprise a pu atteindre de tels paliers de croissance» mentionnent les deux associés.

La SADC a participé, par du financement, aux divers projets d’expansion de la meunerie. Son équipe a également donné un coup de main quand il s’est agi de monter des dossiers complexes et elle n’a pas été avare de conseils pour orienter M. Beauchemin et Mme Vallières afin de leur éviter de perdre un temps précieux à trouver les programmes gouvernementaux dont ils pourraient se prévaloir. « Les propriétaires ont su tout au long de leur expérience d’entrepreneurs conserver leur passion et déployer une énergie incroyable pour que leur établissement soit toujours à l’avant-garde en matière de production biologique », fait remarquer la directrice générale de la SADC de la région de Mégantic, Mme Ginette Isabel, qui ajoute que la Meunerie Milanaise est le plus ancien client de la SADC.

Des fonctions exigeantes pour le chef d’entreprise

Au cours de sa carrière d’entrepreneur, M. Beauchemin a réussi à maintenir une forte implication dans son secteur d’activité. Membre de la Filière agroalimentaire du Québec, il a assumé, par exemple, la présidence de la Filière biologique du Québec, en plus d’avoir été président du Conseil bioalimentaire de l’Estrie. Il fait partie du Groupement des chefs d’entreprise du Québec. Il est membre fondateur de l’OCIA (Organic Crop Improvement Association) International depuis 1985, organisme de premier ordre fort de ses 40 000 membres

dans 22 pays, dont il a d’ailleurs occupé le poste de président entre 1992 et 1996. De 1996 à 1998, M. Beauchemin a aussi agi à titre de président de l’International Organic Accreditation Service. Plus récemment, soit de 1999 à 2002, il a siégé au sein de la délégation du Canada à la Commission du Codex Alimentarius, créée en 1963 par la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) et l’Organisation mondiale de la santé pour élaborer des normes alimentaires dans le but, entre autres, d’assurer la protection de la santé des consommateurs.

Des avantages concrets à la clé

À l’échelle locale, les 25 emplois de la meunerie sont une source de vitalité des plus appréciables pour Milan, une petite collectivité de moins de 400 résidents. De plus, les activités de la minoterie peuvent donner lieu à un essaimage. En 2008, par exemple, les pâtes ALEGRIA ont été acquises par deux entrepreneurs de Stornoway, en Estrie, qui continuent cependant à se procurer farines et semoules auprès de la minoterie.

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Posted on

octobre 21, 2015